Dieu parla à Moché, Il lui dit : « Je suis Hachem. Je suis apparu à Avraham, à Yits‘haq et à Ya‘aqov, en E-l Cha-daï, et [par] Mon Nom Hachem Je ne Me suis pas fait connaître à eux. » (6, 2-3)

Lorsque Moché a dit : « Pourquoi as-Tu fait du mal à ce peuple ? » (5, 22), l’Attribut de stricte justice a voulu le frapper, relate le Midrach (Chemoth Rabba 5, 22). Mais comme il avait parlé ainsi uniquement par souci pour les enfants d’Israël, le Saint béni soit-Il a tenu cet Attribut à distance.

En d’autres termes, explique Rav Yossef Dov Soloveitchik, le Roch yechiva de Brisk, Moché a été épargné grâce à l’Attribut de Miséricorde, qui a été éveillé par sa compassion envers les Hébreux. Le Midrach précise en effet plus loin (6, 1) : « Quand le Saint béni soit-Il a vu qu’il avait parlé par pitié pour ses frères souffrants, Il a agi avec lui selon l’Attribut de Miséricorde, comme est écrit : “Il lui dit : Je suis Hachem !” », le Nom Hachem (Tétragramme) représentant l’Attribut de Miséricorde.
Voilà pourquoi Il a déclaré ensuite qu’Il n’avait jamais fait connaître le Nom Hachem à Avraham, Yits‘haq et Ya‘aqov. A la différence de Moché, dont la survie dépendait de l’intercession auprès de l’Attribut de Miséricorde, nos Patriarches avaient subsisté sans ce recours.
Dieu n’avait donc jamais estimé nécessaire de Se révéler à eux autrement que par le Nom de « Seigneur Tout-puissant » (E-l Cha-daï), associé à l’Attribut de stricte justice.
« Je suis apparu à Avraham, à Yits‘haq et à Ya‘aqov. » (6, 3)
Il est apparu « aux Patriarches », précise Rachi. Cette explication ajoute-t-elle quelque élément au sens simple du verset ? s’étonne Rav Méir de Przemysl.
Ignorions-nous qu’Avraham, Yits‘haq et Ya‘aqov sont nos saints Patriarches ?!

L’intention de Rachi, suggère-t-il, est peut-être de souligner les accomplissements individuels et la valeur de chacun de ces ancêtres. Leur mérite ne réside pas tant dans leur lignée qu’en eux-mêmes.
Chacun d’eux a été un Patriarche de par ses propres vertus, et non simplement un « fils », ou un successeur et héritier spirituel du précédent.

« C’est pourquoi dis aux enfants d’Israël : “Je suis Hachem ! Je vous ferai sortir de sous les fardeaux de l’Egypte, Je vous délivrerai de leur servitude, Je vous sauverai avec un bras étendu et avec de grands jugements. Je vous prendrai pour Moi comme peuple, Je serai pour vous Dieu, vous saurez que Je suis Hachem votre Dieu qui vous fais sortir de sous les fardeaux de l’Egypte.” » (6, 6-7)
Tandis que les gens sont facilement impressionnés par les miracles surnaturels, fait remarquer le ‘Hatham Sofèr, ils ont tendance à considérer comme de pures coïncidences ceux qui sont « cachés » et qui ne s’écartent pas des lois de la nature.
Les événements qui ont accompagné l’Exode en sont un exemple éclairant. La véritable sortie d’Egypte a eu lieu à Pessa‘h, enseignent nos Sages (Roch Hachana 11a), mais elle a commencé en réalité beaucoup plus tôt, le Roch Hachana précédent, quand les décrets de travaux forcés ont été abrogés et que les enfants d’Israël n’ont plus été réduits en esclavage.
Or, les « faibles croyants » n’ont pas discerné la main de Hachem dans cet affranchissement, qu’ils ont attribué à des causes naturelles.
Peut-être n’était-ce là qu’une coïncidence, ont-ils pensé, ou une minuscule étincelle de compassion avait-elle finalement adouci le cœur de Pharaon…
Cela explique une anomalie apparente dans ces versets. La première partie de cette annonce : « Je vous ferai sortir de sous les fardeaux de l’Egypte, Je vous délivrerai de leur servitude » ne contient aucune mention de la reconnaissance par le peuple de l’accomplissement miraculeux réalisé par Hachem. Plus tard, en revanche, après la réalisation du reste de la prophétie : « Je vous sauverai avec un bras étendu et avec de grands jugements. Je vous prendrai pour Moi comme peuple, Je serai pour vous Dieu », il est précisé : « Vous saurez que Je suis Hachem votre Dieu qui vous fais sortir de sous les fardeaux de l’Egypte. » C’est uniquement à ce moment-là que « vous saurez ».
Alors seulement chacun se rendra compte rétrospectivement que les miracles avaient commencé longtemps avant, à Roch Hachana, quand ils ont été « pris de sous les fardeaux de l’Egypte. »