Le début de la parachath Vaèra nous offre un exemple remarquable du fossé qui sépare la division de la Tora en paragraphes massorétiques, les uns « ouverts » ( parachioth pethou‘hoth ), les autres « fermés » ( parachioth setoumoth ), de la division en chapitres.

On attribue la division en chapitres à un théologien chrétien, Hugues de Saint-Cher, qui l’a réalisée au treizième siècle. Les circonstances ont voulu qu’elle fût imposée aux Juifs à l’époque où on les forçait à débattre avec des Chrétiens dans des « disputations », du genre de celles qui ont opposé Ramban ou rabbi Ye‘hiel de Paris à des adversaires résolus à faire triompher leur doctrine.

Nous avons cependant retenu cette division en raison de sa commodité, et nous la trouvons aujourd’hui dans tous les ouvrages réalisés par les éditeurs juifs. Elle procure en effet l’avantage, que n’offre pas la massora , de permettre de repérer aisément n’importe quel passage du Tanakh , d’où un avantage inappréciable pour l’étude et pour l’enseignement.

Pour en revenir à la parachath Waèra ; elle commence au deuxième verset du sixième chapitre du livre de Chemoth . Ce verset, par lequel commence un paragraphe « ouvert » ( paracha pethou‘ha ), introduit un nouveau sujet : la promesse faite par Hachem à Moïse de délivrer les enfants d’Israël de l’esclavage d’Egypte, tandis que le verset précédent, celui sur lequel s’achève la parachath Chemoth , clôt le récit du désespoir des Hébreux.

Il existe d’autres divergences de la même sorte, certaines étant le résultat de véritables contresens comme le chapitre 36 de Chemoth , dont le premier verset se rattache nécessairement à ceux qui le précèdent, et non à ceux qui le suivent. Il en est également qui affirment une volonté préméditée des auteurs de la division capitulaire de se distinguer de la vision juive de la Tora , comme c’est le cas des trois premiers versets du deuxième chapitre de Berèchith , qu’ils ont délibérément dissociés du premier chapitre. Il ne fallait pas, en effet, que ces trois versets, qui introduisent l’idée du repos du Chabbath , soient reliés aux six premiers jours de la Création. Il fallait au contraire qu’ils en soient disjoints afin qu’on ne les confonde pas avec le repos dit « dominical ».

Jacques Kohn (zal)