Parachath Wayaqhel-Peqoudei – Le « rideau » dans nos synagogues.Parmi les ornements qui ont décoré la Tente d’assignation figurait le « voile du rideau » (פרוכת המסך) dont parle la Tora dans Chemoth 39, 34 et 40, 21. Cet ornement a gardé encore aujourd’hui tout l’attachement que lui portaient nos ancêtres dans le désert. Il décore dans les synagogues l’armoire dans laquelle sont conservés les rouleaux de Tora.

Etant donné qu’ils servent à préserver le souvenir d’un parent disparu, ces rideaux sont souvent richement ornés, et leur amoncellement dans les placards de nos lieux de culte empêche parfois qu’on les sorte aussi souvent que le voudraient les familles. Les prescriptions de la Tora (Chemoth 26, 31) sur la façon de confectionner ce rideau (« pourpre, écarlate et lien retors, et effigies de Chérubins ») n’ont évidemment plus cours aujourd’hui. Cependant, l’habitude a été prise, dans certaines synagogues, d’offrir à la mémoire d’une défunte un rideau fabriqué avec les plus belles robes qu’elle avait portées. Cette pratique s’est toutefois heurtée à des objections, tirées de la Guemara Mena‘hoth 22a : « De même que le simple particulier n’a pas le droit de servir devant l’autel, de même le bois et le feu ne doivent pas être prélevés sur ce qu’a utilisé un simple particulier. » C’est ainsi que beaucoup de rabbins se sont prononcés contre l’utilisation, comme objets de culte dans les synagogues, d’objets ayant servi à des usages personnels (Voir notamment Maharil [Rav Ya’aqov ben Moché Moelin (1365 – 1427)] ad Choul‘han ‘aroukh Ora‘h ‘hayyim 153, 21). La raison invoquée à l’appui de cette réticence était que de tels objets, surtout ceux qui avaient été composés avec des accessoires féminins, pourraient détourner les pensées de certains fidèles. Comme l’a exprimé le Bakh (Rav Yoël Sirkis [1561-1640]) dans son oeuvre maîtresse, le Bayith ‘hadach, « les vêtements bigarrés des femmes suscitent des pensées impures et favorisent le penchant au mal ».

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Haftarath parachath ha-‘hodech

Les contradictions du livre d’Ezéchiel

La haftara de Chabbath parachath ha-‘hodech nous fournit l’occasion de vérifier l’authenticité du livre du prophète Ezéchiel et de nous faire prendre conscience des difficultés qui ont entouré son inscription dans notre canon biblique. Cette haftara (Ezéchiel 45, 16 à 46, 18 selon le rite achkenaze et 45, 18 à 46, 18 selon le rite séfarade) décrit le cérémonial qui entourera le service du troisième Temple, celui qui accompagnera la venue du Messie. Or, cette description contredit à plusieurs reprises celle de la Tora. C’est ainsi que la fête de Pessa‘h tombera le quatorze (45, 21) nissan, et non plus le quinze, le nombre d’animaux offerts sur l’autel ne sera plus celui qu’exigeait la Tora, et bien d’autres différences encore. Le livre d’Ezéchiel foisonne de ces contradictions. Il s’en est fallu de peu, enseigne la Guemara (Chabbath 13b, ‘Haguiga 13a, Mena‘hoth 45a), que ce livre fût écarté du canon biblique. C’est l’intervention opportune de ‘Hanania ben ‘Hizqiya qui a emporté la décision. De fait, le livre pouvait laisser l’impression de contredire certaines lois de la Tora : – En paraissant instituer, hors des règles édictées par la Tora, une solennité le sept nissan (45, 20). – En formulant des principes fixant la responsabilité personnelle (Ezéchiel 18, 4 : “L’âme qui péchera, celle-là mourra !”) différents de ceux contenus dans Chemoth 34, 7 : “Il poursuit le méfait des pères sur les enfants, sur les petits-enfants.” Cette contradiction, notons-le, n’est pas résolue par le Talmud (Makoth 24a). – En paraissant limiter aux seuls kohanim (44, 31) l’interdiction de manger la viande d’animaux non égorgés par che‘hita, alors que cette prohibition s’applique à tous les Juifs, la solution de cette difficulté étant renvoyée à l’interprétation du prophète Elie (Mena’hoth 45a). – En semblant étendre à tous les kohanim l’interdiction d’épouser une veuve, alors que la Tora ne l’édicte que pour le kohen gadol (Wayiqra 21, 13 et 14). Cette contradiction est résolue par la Guemara (Qiddouchin 78a et b).
Jacques KOHN zal