Outre l’interdit de manger et de boire, nos Maîtres ont décrété d’appliquer plusieurs lois de l’endeuillé, comme suit.

1. Chaussures en cuir.
Il est interdit de porter des chaussures en cuir, ni même des chaussures en plastique recouvertes de cuir. Si elles n’ont qu’une petite bande de cuir, certains tendent à les permettre.
Selon la loi stricte, il n’y a pas d’interdit à porter des chaussures synthétiques très confortables, même si on les chausse durant le reste de l’année. Certains conseillent tout de même de s’en abstenir a priori.

2. Cet interdits sont en vigueur pendant toute la journée du jeûne, jusqu’à la tombée de la nuit, soit 20 min. après le coucher du soleil. Celui qui traverse des quartiers non-juifs et ressent une gêne à se promener en savates a le droit de porter des chaussures de cuir durant son déplacement, mais devra les ôter dès qu’il arrivera chez lui ou dans un quartier juif. [ch.554 §17]

3. Comme à Kippour, les rapports conjugaux sont formellement interdits. On appliquera même les lois de Har’hakot –éloignement– de la Nida –la femme menstruée. Soit, séparer les lits, et s’abstenir de tout contact, surtout pendant la nuit. [Ibid. §18]

4. Ne pas se laver.
Il est interdit de se laver, ni même de tremper un doigt dans l’eau. , au réveil, on fera la Netilat Yadaïm –l’ablution des mains, en se lavant juste les 3 phalanges des doigts. Et après les avoir essuyés, on passera les doigts encore un peu humides sur les yeux pour les nettoyer, car il est tout de même permis de se rincer à minima une partie du corps sale, ou pour une Mitsva.
En sortant des toilettes, on ne se lavera que le bout des doigts. Si on s’est sali la main, il sera permis de la laver. [Il va sans dire qu’il est interdit de se brosser les dents ou de faire une toilette!]
Nous apprendrons que depuis le début de l’après-midi du jeûne, il devient permis de cuisiner; il sera alors permis de laver les ustensiles, car l’intention n’est pas de tirer un profit de ce lavage.

5. Il est interdit de s’oindre de crème parfumée durant le 9 Av. A l’exception d’une crème que l’on étale pour raison médicale. Par contre, la plupart des décisionnaires permettent de mettre du déodorant.

6. Il est préférable de s’abstenir de fumer pendant Tisha béAv. Celui qui s’en passe difficilement pourra fumer discrètement chez lui, à partir de ‘Hatsot [midi solaire].

7. Comme le prescrit la Halakha de l’endeuillé, il est interdit de saluer son prochain. Si celui-ci ne connaît pas la Halakha et de ce fait, nous a déjà dit bonjour, il est permis de lui répondre, en lui montrant toutefois un visage attristé, meurtri par le deuil.

8. Le Choul’han Aroukh [ch. 554 §21] recommande de ne pas se promener pendant Tisha béAv, afin de ne pas détourner notre attention du deuil. Pour cette raison, certains décisionnaires recommandent de ne pas s’amuser avec les enfants.

9. La Torah réjouissant le cœur de celui qui l’étudie, il est interdit d’étudier pendant Tisha béAv. Néanmoins, il est permis d’étudier des sujets qui attristent, comme les lois de deuil, ou encore, les Prophètes ou Midrash qui traitent des malheurs de la destruction du Temple.

10. On a l’usage de s’asseoir par terre jusqu’à la mi-journée. Il est permis de se surélever jusqu’à 12 cm. Une personne faible pourra s’asseoir sur un rehausseur haut de 36 cm.

11. De même, le Choul’han Aroukh [ch.555] évoque l’usage de dormir par terre en plaçant une pierre sous l’oreiller. Il n’est toutefois pas obligé de procéder ainsi, mais chacun s’efforcera de dormir moins agréablement que d’habitude.

12. Pendant que l’on récite les Kinoth – les lamentations, il est formellement interdit de sortir dehors pour parler de sujets profanes.

13. Travailler à Tisha béAv. Selon la loi stricte, il n’est pas interdit de travailler durant le 9 Av. Néanmoins, l’usage est de s’en abstenir, jusqu’à la mi-journée au moins.

14. Prière du matin.
L’usage est de ne mettre le Talit et les Téfilin qu’à partir de l’après-midi de Tisha béAv [ch.555 §1]. On portera tout de même le Talit Katan, mais ne prononcera pas de Berakha dessus. Toutefois, l’usage séfarade Yéroushalmi –adopté par la plupart des séfarades d’Israël– est plutôt de les mettre depuis la prière du matin, se fondant sur la Kabbale. Il n’y a pas de Mitsva de polémiquer sur ce sujet; chacun pourra garder l’usage de ses parents, ou adopter l’usage de sa communauté.

15. L’après-midi du jeûne. Dès ‘Hatsot [midi solaire], plusieurs lois du deuil s’allègent. Il devient permis de s’asseoir sur une chaise et de cuisiner. Ceux qui n’ont pas mis les Tefilin le matin pourront les porter. [Il n’est pas nécessaire d’attendre Min’ha pour les mettre. Il sera d’ailleurs préférable de ne pas retarder cette Mitsva.] Il demeure néanmoins interdit de se promener ou de plaisanter jusqu’au soir. Il est même défendu d’étudier des sujets de Torah qui réjouissent. Celui qui veut lire les Prophètes qui évoquent la destruction du Temple doit sauter les passages de consolation.

16. Les dispensés de jeûne. Le jeûne de Tisha béAv étant presqu’aussi important que Kippour, une femme enceinte ou qui allaite doit en général jeûner. Mais cette année – où le jeûne est déplacé au 10, elles sont dispensées selon la loi stricte. L’usage est toutefois de jeûner dans la mesure du supportable. [Elles devront auparavant se concerter avec un Rav et un médecin qui a la crainte du ciel, pour s’assurer que le jeûne ne leur nuira pas]. Idem pour les personnes âgées. Une accouchée dans ses 30 jours ou un malade faible sont exemptés de jeûner.

17. Lorsqu’on est exempté, on se contentera de ne manger que le minimum pour se maintenir, sans consommer d’aliments raffinés. De même, on s’efforcera de jeûner au moins quelques heures. Avant de manger, il faudra dire la Havdala, comme nous le préciserons.

18. Brit Mila.
Selon la loi stricte, puisque le jeûne est déplacé au 10, l’usage est que le père, le Mohel et le Sandak interrompent le jeûne depuis l’après-midi [ch.559 §9]. Concrètement, dès ‘Hatsot, ils se laveront et mettront leurs beaux habits et chaussures de cuir, mais ne pourront pas encore manger. Ils prieront alors Min’ha, feront la Brit Mila, diront le Kidoush du Brit, mais ne boiront toujours pas de ce vin, puisqu’ils n’ont pas dit la Havdala ; ils donneront ce verre à boire à la mère, à un malade ou à un enfant – qui ont déjà dit la Havdala pour manger. Ils verseront alors un 2e verre de vin et diront la Havdala, et pourront dès lors manger et boire. Ils s’abstiendront tout de même de manger un grand repas, et ne feront la Séoudat Mitsva qu’après le jeûne. De même, l’interdit d’étudier la Torah leur incombe encore.
Lorsqu’ils diront la Havdala, les convives pourront écouter cette Havdala et s’en acquitter [sans goûter le vin, bien évidemment !]. Il sera d’ailleurs préférable de s’acquitter ainsi, plutôt que d’attendre le soir.

19.. La Havdala.
Après le jeûne, il faut impérativement dire la Havdala avant de manger ou boire quoi que ce soit. On prendra un verre de vin ou de jus de raisin, sur lequel on dira la Berakha de haGuefen puis la Berakha de ‘Hamavdil bein Kodesh le’Hol… On ne fera de Berakha ni sur les Bessamim [herbes odoriférantes], ni sur la bougie – puisque la Mitsva de réciter ces 2 Berakhot ne concerne qu’une Havdala récitée le samedi soir. Certains rapportent qu’il n’est pas non plus nécessaire de dire les versets d’usage avant la Havdala.
Les ashkénazes préfèreront une autre boisson alcoolisée, ou du jus de raisin, à du vin [comme nous l’expliquerons ci-après (4°).]

20. Celui qui a omis de dire la Havdala pourra se rattraper jusqu’au mardi après-midi. Dès qu’il réalisera son oubli, il devra immédiatement se procurer du vin et la dire, comme précédemment.

21. En temps normal, nous continuons à observer plusieurs coutumes de deuil le lendemain de Tisha béAv – notamment, nous nous abstenons de manger de la viande et de boire du vin jusqu’à la mi-journée du 10 Av [certains s’abstiennent jusqu’au soir]. De même, on n’écoute pas de musique jusqu’au soir, sauf pour une fête de Mitsva.
Ces usages proviennent du fait que les Romains commencèrent à incendier le Beit Hamikdash l’après-midi du 9 Av, à l’approche du soir, et que le Temple brûla essentiellement le 10 Av. En l’occurrence, ces lois n’ont pas lieu d’être pour demain, puisque nous serons le 11 Av.
Toutefois, le Rama enseigne que le deuil continue partiellement pour ce soir uniquement, du fait que les lois de deuil donnent à la nuit qui suit le statut du jour précédent. Ainsi, les ashkénazes ne consommeront pas de viande ce soir, sauf pour un repas de Mitsva – par ex. s’il y a eu une Brit Mila pendant le jeûne.
Pour les séfarades, rav Ovadia Yossef zatsal prouve que l’usage est de terminer totalement les usages de deuil à la fin du jeûne. Et d’ajouter que Rabbi Haïm Vital zatsal a déjà mangé de la viande à la sortie du jeûne dans une telle configuration.

22. Beaucoup attendent la sortie du jeûne pour dire la Birkat haLevana –la Berakha sur le renouvellement du cycle lunaire. A priori, on la récitera après avoir remis les chaussures en cuir, et mangé un peu. Mais a posteriori –par ex. si on ne peut pas dire la Havdala, et qu’il n’est pas possible de se rassembler plus tard pour dire cette Berakha en groupe– on la récitera immédiatement à la sortie de la synagogue.

Messieurs: rentrez rapidement à la maison après la Tefila afin d’acquitter les femmes de la Havdala. Autrement, il leur est défendu de manger ou de boire – à l’exception de l’eau si nécessaire !

23. Celui qui s’attriste et porte le deuil de Jérusalem méritera de voir sa consolation, et sera inscrit dans le livre des Justes de Jérusalem. Tandis que celui qui ne porte pas le deuil de Jérusalem ne sera pas digne de voir sa reconstruction […] Que tout le peuple d’Israël qui espère en le salut d’Hashem contemple prochainement Sa splendeur dans Sa demeure éternelle reconstruite, Amen. [Shibolei haLeket ch.274]