Nos Sages enseignent dans le Midrach : « Au moment où D.ieu dit à Moché : ‘ Qu’ils Me construisent un Sanctuaire ’ (Chémot 25, 8), ce dernier répliqua : ‘ Le Ciel et tous les Firmaments ne suffisent pas à Te contenir, et Tu voudrais qu’ils Te construisent un Sanctuaire !? ’. Le Saint Béni soit-Il lui répondit : ‘ Ce que Je demande n’est pas ce que tu crois : qu’ils disposent vingt poutres au nord, vingt au sud et huit autres à l’ouest, et Moi, Je descendrai et réduirai Ma Ché’hina pour résider parmi vous, comme il est dit : ‘ Là-bas Je te donnerai audience ’, (Chémot 25, 22) », (Psikta déRav Kahana Ki Tissa 2).

Puisque telle était la vocation du Tabernacle – accueillir concrètement la Présence divine -, il va sans dire qu’il ne saurait se résumer à n’être qu’une  » bâtisse de bois et de pierres  » : tous les matériaux devaient y être impérativement offerts dans un esprit de pure générosité et d’entier dévouement à la cause divine.

Savoir préparer son cœur aux mitsvot

Dans les grands ouvrages de notre sagesse, nous retrouvons souvent le principe incontournable de la « préparation aux mitsvot » : plus on se sera préparé spirituellement avant d’accomplir une action, meilleure sera la qualité de son exécution.
On trouve à ce sujet des propos édifiants écrits par le Ram’hal dans son célèbre ouvrage  » Messilat Yécharim  » (chapitre 17) : « Ne pas entrer dans le ‘vif’ de la mitsva soudainement, sans laisser son esprit s’imprégner de l’action et la méditer. On devra d’abord se préparer et user de pondération, jusqu’à pouvoir méditer convenablement ce qu’on s’apprête à accomplir, et bien se concentrer sur Qui il s’apprête à agir ».
Certains grands auteurs affirment même que sous un certain angle, la préparation à la mitsva peut même surpasser la mitsva proprement dite. En effet, cette dernière n’est pas systématiquement accomplie dans un état d’esprit parfaitement pur : il arrive parfois que certains intérêts se mêlent à sa réalisation, ou peut-être même une certaine  » recherche d’honneurs « . En revanche, pour ce qui est des préparations morales aux mitsvot, tout se passe uniquement dans le cœur et l’esprit de l’homme, lieux privilégiés à l’abri des regards extérieurs : à ce niveau, il n’y a guère de risques que des enjeux extérieurs ne se mêlent aux intentions pures qui les ont motivés. C’est pourquoi la préparation peut s’avérer supérieure à l’acte qu’elle induit.

En réalité, on trouve à ce sujet une dimension encore plus profonde souvent évoquée par le Sfat Emet : non seulement la préparation peut surpasser l’action proprement dite, mais de surcroît, il s’avère que l’homme n’a de réelle maîtrise, dans tout acte de mitsva, que sur ses préparatifs exclusivement ! En effet, explique ce maître (Térouma 5633), toute mitsva suppose une ouverture vers des sommets spirituels qui influeront sur l’ensemble de la Création. Or, quel être de chair et de sang est-il capable d’orchestrer de si prodigieuses répercussions ? Il nous faut en conclure que, par égard pour la volonté de l’homme d’accomplir le bien, le Saint Béni soit-Il lui porte assistance en aidant ainsi ses actes à prendre de si hautes proportions. Il en résulte que la seule et unique valeur que l’homme possède en propre dans tout ce processus est bel et bien la préparation devançant l’acte de la mitsva.

La qualité intrinsèque des actes

La Torah dit à propos de la confection des instruments du Tabernacle et des habits sacerdotaux : « Tu enjoindras à tous les artistes habiles, que J’ai remplis d’un esprit de sagesse, qu’ils fassent les habits de Aharon pour le sanctifier », (Chémot, 28, 3).
De prime abord, ce verset semble annoncer que ces artistes habiles furent « remplis d’un esprit de sagesse ». Cependant, si tel était vraiment le cas, on aurait dû lire « Milétim – Je les ai remplis » et non « Milétiv – Je l’ai rempli » au singulier.
C’est que d’après rav Nathan Tsvi Yéhouda Berlin (Haémek Davar), D.ieu parle dans ce verset spécifiquement de Aharon, qui fut ainsi rempli d’esprit de sagesse : « Après que D.ieu lui ordonna de se sanctifier, Il lui offrit des habits de sacerdoce, pour l’aider en ce sens, (…) parce qu’il est connu que pour toute chose sacrée, hormis la nécessité impérieuse de la réaliser de manière désintéressée, une plus grande préparation à des fins de sainteté lui attribuera une meilleure qualité ; (…) c’est pourquoi Moché dut mettre en garde les artisans – qui craignaient eux-mêmes déjà le Ciel – de confectionner les habits de manière à ce qu’ils soient sanctifiés au mieux. Or, parce qu’il s’agit d’une ‘ disposition du cœur ‘, D.ieu précisa avant tout que Aaron avait été rempli de la sagesse du cœur – c’est-à-dire que par l’effet qu’auraient sur lui ses habits, il saurait dans quelle intention ils furent confectionnés ».
Si déjà Aharon, un être humain, pouvait ainsi déceler dans les habits qu’il portait les intentions profondes accompagnant leur confection, à plus forte raison D.ieu perçoit-Il toutes les pensées qui accompagnent chacun de nos actes… Voilà pourquoi, au sujet de la construction du Tabernacle, la Torah insiste tant sur la  » disposition du cœur  » : elle seule est en mesure de permettre au Sanctuaire de réaliser sa vocation et d’accueillir pleinement la Présence divine.

Le  » Tabernacle du cœur « 

À ce titre, la Torah place sans cesser l’accent sur la générosité et la dévotion pour tout ce qui touche à l’édification du Sanctuaire, bien plus que pour toute autre mitsva. Nous savons en effet que cet édifice saint constitue, avant tout, l’expression extérieure d’une dynamique intérieure et profonde alors vécue par les enfants d’Israël. Pour le Bet Israël (Térouma 5711), c’est à ce sujet que nos Sages disent : « Le Temple d’En-haut coïncide avec le Temple d’en-bas ». Car de fait, le Temple des Cieux puise sa source directement dans la dilatation et la dévotion logées à l’intérieur du cœur de chaque Juif. Et ce sont bien les cœurs d’ici-bas qui donnent au Temple sa pleine dimension, et qui lui permettront ainsi d’être très prochainement reconstruit ! Amen.

Par Yonathan Bendennnoune

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