« Pourim est appelé au nom de Yom Kippour… » C’est ce qu’enseigne le Tikouné Zohar (tikoun 21). L’Admour de Ruzhin remarquait que puisque, d’après cet enseignement, Yom Kippour est le « Jour qui est comme Pourim [Ké-Pourim] », c’est forcément que Pourim le surpasse en importance…

L’Admour de Tchortkov, l’auteur du Yisma’h Israël, explique la particularité de Pourim, en cela que « Yom Kippour n’apporte le pardon qu’aux hommes qui se repentent. Alors que Pourim offre l’expiation aussi bien à ceux qui se repentent qu’à ceux qui ne le font pas, comme le dit l’expression : ‘En ce jour, tout celui qui tend la main, on lui accorde ce qu’il veut’. »
Selon rav Tsadok HaCohen de Lublin (Peri Tsadik sur Pourim), la relation entre ces deux dates s’explique notamment par le fait que c’est le jour même qui offre le pardon : « De même qu’à Yom Kippour, c’est l’essence même du jour qui suscite le pardon, ainsi le jour même de Pourim entraîne l’effacement d’Amalek. L’homme, pour sa part, doit simplement se souvenir que ces jours sont, respectivement, Yom Kippour et Pourim… »
Ces deux dates sont aussi liées en cela qu’elles ne seront jamais abolies, pas même dans les Temps futurs, contrairement aux autres fêtes de l’année. Le Midrach (Michlé 9) déduit en effet du verset : « Ces jours de Pourim ne disparaîtront jamais du sein du peuple juif », que cette fête se maintiendra à jamais. Et le Midrach d’ajouter : « Rav Yossef dit : Yom Kippour non plus ne disparaîtra jamais comme il est dit : ‘Vous le célébrerez à jamais.’ »
Le Rachba, dans ses responsa (93), s’intéresse à ce Midrach et remarque qu’on ne saurait le comprendre au sens littéral : il est en effet évident que jamais une seule lettre de la Torah ne sera abolie ! En conséquence, il interprète ce Midrach de la manière suivante : pour toutes les autres fêtes de l’année, il peut survenir des situations où, par l’effet des fautes et de l’exil, le peuple juif cessera de les respecter. Mais pour Pourim, « le verset nous assure que jamais cette fête ne disparaîtra ni ne cessera, car D.ieu l’a promis (…). De même pour Yom Kippour : nous avons la promesse que ce jour perdurera ‘à jamais’, car il expiera nos fautes même si on ne le respecte pas… »
Rabbi Tsadok HaCohen reprend ces propos et note que, de toute évidence, pendant les périodes de persécutions, il est forcément arrivé parfois que le peuple juif ne pût respecter Pourim. Il convient donc de comprendre l’explication du Rachba ainsi : « Le fait que Pourim ne cessera jamais signifie que la force de ces jours, par laquelle Amalek est détruit dans les Cieux, ne disparaîtra jamais, à l’instar de Yom Kippour qui apporte le pardon par son propre pouvoir, même lorsque le peuple juif ne jeûne pas. »
Ainsi, chaque année, l’empreinte d’Amalek est un peu plus détruite dans les Cieux, et le jour où son souvenir aura complètement disparu, la délivrance pourra survenir.

Pourim apporte le pardon
Rabbi Klonimous Kalman Epstein, l’auteur du Maor VaChémech, écrit à ce propos : « De même qu’à Yom Kippour, il n’y a ni Satan ni catastrophe (…), ainsi Mordékhaï et Esther agirent de manière à ce qu’à Pourim, aucune accusation ne puisse être portée contre le peuple juif, comme à Yom Kippour. C’est en cela que Yom Kippour est ‘comme Pourim’. »
Rabbi Eliyahou HaCohen de Izmir, l’auteur du Chévet HaMoussar, explique l’origine de cette relation : « À Pourim, le Saint béni soit-Il expie les fautes exactement comme à Yom Kippour (…) Je me souviens avoir entendu de mon maître, selon les explications cabalistiques, (…) que l’on pourrait en trouver l’allusion dans l’enseignement suivant : ‘Quiconque mange le neuf [Tichri] est considéré comme s’il avait jeûné le neuf et le dix.’ C’est-à-dire que de même que le pardon peut être suscité par le jeûne, ainsi la consommation d’aliments et de boissons peut aussi le déclencher. C’est donc une allusion au fait qu’à Pourim, on bénéficie d’une expiation précisément grâce aux festins célébrés. »
Rabbi Bounam de Pchis’ha remarquait que si l’on en s’en tient au fait que Yom Kippour est « comme Pourim », il apparaît que Pourim serait même supérieur à Yom Kippour. Pourquoi cela ? « Car à Yom Kippour, on se mortifie le corps, alors qu’à Pourim, on mortifie l’esprit. Nos Sages prescrivent en effet : ‘Tout homme est tenu de se soûler à Pourim jusqu’à ce qu’il ne sache plus…’ – c’est-à-dire jusqu’à ce qu’il perde le contrôle de sa pensée. Or, la privation infligée à l’esprit est bien pire que celle du corps, c’est pourquoi Yom Kippour n’est lui-même qu’un reflet de Pourim… »

Le festin de Yom Kippour
Une autre relation entre ces deux dates du calendrier apparaît dans le fait qu’elles sont toutes deux le jour où le peuple juif reçut la Torah. Telle est l’explication que donne le Gaon de Vilna (Likouté HaGra) : « A Yom Kippour, nous avons reçu les secondes Tables de la Loi, comme cela apparaît dans le Traité Taanit. Et à Pourim, il est dit que ‘les Juifs reçurent à nouveau la Torah du temps d’Assuérus’. C’est pourquoi ces deux fêtes sont rapprochées. »
Le Gaon de Vilna ajoute que Pourim vient également « compléter le jeûne de Yom Kippour » ; c’est-à-dire, explique son élève rav Its’hak Eizik ‘Haver, que Yom Kippour mériterait d’être célébré avec des festins, puisque ce fut le jour du Don de la Torah. Et comme il est impossible de manger à Yom Kippour, c’est Pourim qui vient remplacer ce manque.
À cet égard, le Don de la Torah incarné par ces deux fêtes réclame de notre part de l’accepter à nouveau à chacune de ces dates. Tels sont les propos de rav Lévi Its’hak de Berditchev à ce sujet : « Le cœur de l’homme s’emballera en lisant et en écoutant la Méguila ; il pensera accepter dorénavant le joug de la Torah et des mitsvot, comme le disent nos Sages : ‘Ils reçurent et acceptèrent [la Torah]’ (…). Et l’on se dira alors que le passé est révolu et que pour l’avenir, on accepte le joug de la Torah…
C’est pourquoi il est dit dans le Zohar que Yom Kippour est comme Pourim, car l’éclat spirituel de Yom Kippour est semblable à celui de Pourim (…) À Yom Kippour, ce qui a été n’est plus et ce jour purifie l’homme à l’avenir ; ainsi à Pourim, on accepte pour l’avenir le joug de la Torah et des mitsvot, et l’on doit se réjouir de cette nouvelle soumission à la Torah. »

Par Yonathan Bendennnoune,

Adapté à partir d’un article du rav Moché Reiss, pour Hamodia en hébreu.