La « nézirout » – limites et préventions…
Le chapitre de la « sota » – la femme soupçonnée d’adultère – est juxtaposé dans la Torah à celui du « nazir »
(l’abstème qui formule le voeu de cesser notamment la consommation de vin). Or, selon nos Sages, ce rapprochement est fondé
sur un enseignement bien précis : « Quiconque voit une sota dans sa déchéance devra s’abstenir de vin ».

La couronne de son D.ieu

La leçon à laquelle le chapitre de
la femme sota nous invite mérite
de rester à tout moment profondément
ancrée dans notre esprit !
Ainsi Rachi, suivant en cela l’une
des interprétations données par
nos Sages, indique-t-il que cette
expression de « sota » a pour racine
étymologique le mot : « chtout »
– c’est-à-dire la « folie » – dans la
mesure où « nul ne commet de faute
si ce n’est à cause d’un ‘esprit
de folie’ qui s’est emparé de lui »,
(Traité talmudique Sota, page 3/a).
En effet, tout homme lucide et disposant
pleinement de sa raison ne
peut, dans l’absolu, en venir à être
séduit par la faute… Or s’il en arrive
à ce stade, c’est nécessairement
que son « yétser hara » [mauvais
penchant] s’est emparé de son esprit
et lui a fait perdre le contrôle
de lui-même.

On sait que de nos jours, les « circonstances
atténuantes » de ce
type sont souvent jugées avec
une certaine part de clémence par
la justice laïque. Mais d’après la
Torah, ces considérations ne sauraient
être prises en compte : pour
elle, tout homme sain d’esprit est
en parfaite mesure de surmonter
toutes ses tentations et s’il devait
survenir une situation susceptible
de lui faire perdre les rênes de
sa volonté, il lui incombe de tout
mettre en oeuvre pour ne jamais
s’y trouver confronté !

Ainsi, pour contrer cet « esprit de
folie », l’homme doit-il redoubler
de clairvoyance et c’est bien pour
cela que la Torah enjoint à quiconque
assisterait à la déchéance
d’une sota d’établir des barrières
nettes entre lui-même et la
consommation de vin…
Le nazir est en effet désigné par
la Torah comme portant « l’auréole
de son D.ieu sur sa tête » (Bamidbar,
6, 7). Selon l’Ibn Ezra, cette
« auréole » [« nézer » en hébreu]
est effectivement le symbole de la
force du nazir : « Sache que tous
les hommes sur terre sont les serviteurs
de leurs tentations et le seul
roi véritable – c’est-à-dire l’homme
portant sur sa tête l’auréole et la
couronne de la royauté – est celui
qui se libère de ses tentations ».
Par conséquent, il apparaît clairement
que le principe fondamental
du nazir consiste à s’éloigner
de toutes les tentations vers lesquelles
sa nature et ses sens l’entraînent,
pour empêcher ces derniers
de prendre le contrôle de sa
personne.


Visions dangereuses…

Cette relation qui rapproche le nazir
de la sota suggère toutefois un
autre point non moins remarquable
: non seulement la personne
ayant déjà commis une faute mérite
de ce fait de redoubler de vigilance
à son propre égard, mais
même celle qui n’aurait fait qu’assister
à une faute devra également
décupler de zèle à l’encontre de
toutes ces tendances fâcheuses !
De fait, n’oublions pas que le spectacle
de « la sota déchue » ne se déroulait
nulle part ailleurs que dans
le Temple de Jérusalem, à l’endroit
même où résidait la Ché’hina et où
dix miracles avaient lieu couramment…
Pourtant, en ce même lieu
extrêmement saint, si l’on venait
à voir une femme soupçonnée
d’adultère être mise à l’épreuve,
on devait aussitôt s’empresser de
se « vacciner » face à cette terrible
vision en devenant nazir.
Contrairement à l’opinion généralement
admise voulant qu’une
vision n’interfère pas nécessairement
avec les pensées ou les sentiments
d’un observateur, la Torah
conçoit quant à elle que tout fait
dont l’homme est témoin influe
sur sa personne d’une manière ou
d’une autre…

En effet, l’homme doit – ou est supposé
devoir – considérer toutes les
interdictions de la Torah comme
des caps infranchissables. Nous
pourrions illustrer cette idée par
l’exemple d’un homme à qui l’on
demanderait de plonger au beau
milieu des hautes flammes d’un
incendie… Il va sans dire que toute
personne saine d’esprit répondrait
être incapable de satisfaire cette
demande ! Or, cette réponse ne
s’avère pas parfaitement exacte
dans la mesure où techniquement,
chacun peut parfaitement accomplir
cet acte ; néanmoins, c’est la
conscience des conséquences terribles
d’un tel geste qui laisse le
sentiment très net que nous ne
pouvons pas le faire.

Ainsi en est-il des mitsvot de la
Torah : à l’origine, tout homme
sensé doit se considérer incapable
d’enfreindre l’ensemble de ses
préceptes. Cependant, à l’instant
où l’on voit autrui commettre une
infraction, la gravité s’en atténue
sensiblement à nos yeux, même
si nous devions assister au même
moment au châtiment infligé à
cette personne ; et ce, parce que
dès lors que la transgression est
accomplie sous nos yeux, elle en
devient possible !


Plus d’actes
que de sagesse !

Cette relation établie entre le
spectateur et la vision qui s’offre à
lui trouve de solides racines dans
la tradition ‘hassidique. Un enseignement
transmis au nom du Baal
Chem Tov (voir « Déguel Ma’hané
Efraïm « – à la fin de la paracha
Chela’h-Le’ha entre autres) affirme
que le simple fait d’être le
témoin d’un acte funeste et négatif
implique que l’on est soi-même
concerné en son for intérieur par
cette même faute. Nulle circonstance
n’étant en ce monde le fruit
du hasard, il s’avère donc que toute
scène qui se présente à nos yeux
est porteuse d’un message : en
l’occurrence, cela suppose que le
spectateur s’en retrouve lui-même
« atteint » d’une certaine manière
par le mal dont il est témoin.
C’est dans cet esprit que le Baal
Chem Tov interprétait une règle
relative à la plaie de tsaraat :
« L’homme peut voir les plaies [de
toute personne] sauf [‘houts] les
siennes propres » (Michna Négaïm
2, 5)… Or, ce même enseignement
peut également se lire ainsi :
« Toutes les plaies que l’homme
voit à l’extérieur [‘houts] ne sont
que les siennes propres ».
Par conséquent, lorsqu’un homme
se trouve en présence d’une
femme sota au moment où elle est
soumise dans l’enceinte du Temple
à de terribles avilissements,
c’est nécessairement le signe qu’il
mérite lui-même de s’identifier
à cette femme… C’est pourquoi
il convient pour lui de s’éloigner
sur-le-champ de toute pratique
susceptible de l’entraîner vers la
débauche.

Dans son ouvrage « Pri haArets »,
le rav de Vitebsk zatsal développa
ce principe par l’idée suivante :
quand bien même l’homme assisterait-
il de ses propres yeux à la
déchéance de la sota, quand bien
même verrait-il ainsi le sort qui
attend toute personne s’écartant
des chemins de la Torah, ce témoignage
ne lui permet d’assimiler
ces faits que mentalement, à savoir
uniquement au niveau de la
connaissance. Or, tout homme est
tenu d’investir « ses actes » d’une
plus grande intensité que « sa pensée
», sans quoi celle-ci ne saurait
perdurer et risquerait même de
l’entraîner à sa propre perte ! C’est
pourquoi il est si impératif qu’aussitôt
après avoir pris connaissance
du sort qui attend la femme sota,
cet homme doive sur-le-champ
mettre cette nouvelle information
en « application »…

Adapté par Y. Bendennoune à
partir d’un article du rav M. Reiss
paru dans Hamodia en hébreu,
Avec l’accord exceptionnel d’Hamodia-Edition Française

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