Mathusalem est surtout connu pour avoir vécu neuf cent soixante-neuf ans (Berèchith 5, 27), durée qui a fait de son nom un synonyme de « longévité ».Cette durée de vie exceptionnelle, que n’a atteinte aucun autre personnage biblique, a fortement impressionné les esprits. C’est ainsi qu’un pin des Etats-Unis, appelé le « pin de Bristlecone » (Pinus longaeva) a été longtemps appelé « arbre de Mathusalem », car il était considéré, jusqu’à une époque récente, comme l’organisme vivant le plus âgé de notre planète.

Disons que cette impressionnante longévité a également impressionné les auteurs du Talmud. « Sept personnages, nous apprend Baba Bathra 121b, ont embrassé de leur vivant l’ensemble de la durée de l’espèce humaine : Mathusalem a vu Adam, Sem a vu Mathusalem, Jacob a vu Sem, Amram a vu Jacob, A‘hia ha-chiloni [prophète de l’époque de Salomon] a vu Amram, Elie a vu A‘hia ha-chiloni, et [Elie] est toujours vivant. »

Le Midrach nous donne davantage de détails : « Mille six-cent cinquante-six ans se sont écoulés entre Adam et le Déluge. Hanokh [fils de Caïn] a inhumé Adam et lui a survécu pendant cinquante-huit ans. Mathusalem a vécu jusqu’au Déluge. Jacob a été le contemporain d’Abraham pendant quinze ans, et Sem pendant cinquante-huit ans. Sem a été le contemporain de Mathusalem pendant quatre-vingt-dix huit ans, et Mathusalem celui d’Adam pendant deux-cent quarante-trois ans. C’est ainsi que quatre hommes ont été les contemporains de vingt-deux générations » (Yalqout Chim‘oni Berèchith 42).

« Adam a transmis les vêtements de peau [que Hachem avait confectionnés pour sa femme et lui (Berèchith 3, 21)] à Mathusalem, et  Mathusalem à Noé, et Noé à Sem, et Sem à Malki-Tsédeq, etc. » (Midrach agadath Berèchith 5, 28).

Il est écrit : « Lèmekh vécut cent quatre-vingt-deux ans. Il enfanta un fils. Il lui donna pour nom Noé… » (Berèchith 5, 28 et 29).

S’il n’est pas, comme à l’accoutumée, écrit qu’il « enfanta Noé », c’est parce que Mathusalem avait conseillé à Lémekh de ne pas se hâter de le nommer. Les gens de sa génération pratiquaient en effet la sorcellerie, et ils auraient ensorcelé l’enfant s’ils avaient su son nom (‘Hizqouni et Da‘ath zeqènim ad loc.).

Au moment de déclencher le déluge, Hachem donna à Noé un dernier délai de sept jours (Berèchith 7, 4). Que signifiaient ces sept jours ?

Ces sept jours correspondaient à la durée de la semaine de deuil qui a suivi la mort de Mathusalem, ce qui nous apprend que Hachem prend égard aux honneurs dus lors du deuil d’un Juste et qu’Il repousse alors le moment du châtiment (Sanhédrin 108b, cité par Rachi ad loc.).

Signalons encore un commentaire de rabbi Yits‘haq bar Achèr de Spire, dit le Riva, élève de Rachi et l’un des premiers Tossafoth d’Allemagne, à propos du verset qui nous apprend que Hachem, lors de la Création, a fait deux grands luminaires : un grand pour la domination du jour, et un petit pour la domination de la nuit, et les étoiles, pour séparer la lumière et les ténèbres (Berèchith 1, 16 et suivants).

Or, nous lisons que, dans le monde à venir, « la lumière de la lune sera comme la lumière du soleil, et la lumière du soleil sera septuple, comme la lumière de sept jours… » (Isaïe 30, 26). Ces « sept jours » dont parle ce verset, ce sont les sept jours du deuil de Mathusalem.

Jacques KOHN zal’