Quelle est l’origine du chant de Ma‘oz tsour que nous entonnons après avoir allumé les lumières de ‘Hanouka ?

Les premiers mots de ce chant (Ma‘oz tsour) trouvent leur source dans le Tanakh : « Car tu as oublié le Dieu de ton salut, et tu ne t’es pas souvenu du rocher de ta protection (we-tsour ma‘ouzèkh)… » (Isaïe 17, 10).

Il est composé de six strophes, les cinq premières étant arrangées sous la forme d’un acrostiche du nom Mordekhaï (mèm, rèch, dalet, kaf, youd).

Ce chant rappelle l’essentiel de notre histoire à travers les libérations de l’Egypte, de Babylone et de Haman, et il conclut, avec l’évocation du miracle de ‘Hanouka, en exprimant l’espoir d’une prochaine reconstruction du Temple.

Ces cinq strophes ont acquis une renommée mondiale. Bien qu’elles aient été probablement écrites par un auteur européen, elles ont acquis partout droit de cité, y compris dans les communautés sefarades.

On sait peu de choses sur leur auteur, si ce n’est qu’il s’appelait Mordekhaï et qu’il a vécu en Allemagne au treizième ou au quatorzième siècle. Selon certains auteurs, il s’identifierait à Mordekhaï ben Yits‘haq, l’auteur du chant du vendredi soir intitulé Ma yafith.

Une sixième strophe, commençant par les mots : ‘hassof zero‘a qodchékha, formant l’acronyme ‘hazaq, a été introduite plus tard, certains auteurs l’attribuant à rabbi Moché Isserlis (Rema).

Cette sixième strophe n’a pas été adoptée par les communautés sefarades.

La raison de cette exclusion se trouve peut-être dans son dernier vers, qui évoque des événements dont les communautés établies en terre d’islam n’ont pas eu à souffrir :
De‘hei Admon be-tsèl tsalmon, haqem lanou ro‘im chiv‘a – « Repousse Admon, à l’ombre de tsalmon, suscite pour nous les sept bergers. »

Admon (« rouquin ») pourrait désigner l’empereur d’Allemagne Frédéric Barberousse, moteur de la troisième croisade (1188-1192). Celle-ci a, comme toutes les autres, été accompagnée de nombreux massacres dans les communautés juives européennes. D’où l’emploi, dans le même vers, du mot tsalmon, qui s’applique à ceux qui portent un tsélem (« croix »). Quant aux « sept bergers » que nous appelons à notre secours, ce sont ceux dont parle le prophète : « Telle sera la paix de l’Assyrien lorsqu’il entrera dans notre pays, et quand il mettra le pied dans nos palais, nous établirons contre lui “sept bergers” et huit princes des hommes » (Michée 5, 4).

Ces « sept bergers » représentent nos défenseurs contre ceux qui nous agressent.

Jacques Kohn

 

Tirée de notre site Techouvot.com