Une semaine à peine après la triste journée du 9 av , commémoration des grandes catastrophes qui se sont abattues sur notre peuple au cours de siècles, nous voici voguant à nouveau dans les eaux calmes d'une date de fête, celle du 15 av .

Cette date du 15 av , de même que celle du 9, n'est pas mentionnée dans la Tora . Elle célèbre, nous apprend la Guemara ( Ta?anith 30b), un certain nombre d'événements heureux dont nous avons bénéficié tant dans l'histoire biblique que dans celle qui a suivi la période du Tanakh .

1. C'est le 15 av de la dernière année du traversée du désert qu'a pris fin la mortalité de ceux des enfants d'Israël qui avaient été condamnés à mourir pendant les quarante ans qui ont suivi l'épisode des explorateurs ( Bamidbar 14, 29).

2. C'est le 15 av qu'a été abolie l'interdiction des mariages intertribaux. On sait que, après que les filles de Tselof?had ben ?Héfèr ont demandé et obtenu le droit pour les filles d'hériter de leur père en l'absence d'enfants mâles ( Bamidbar 27, 1), les chefs de la tribu de Manassé ont demandé et obtenu, afin de préserver l'intégrité territoriale de leur canton tribal, que les filles bénéficiant de ce droit successoral ne puissent épouser que des hommes de leur propre tribu, à l'exclusion des autres ( Bamidbar 36, 1 et suivants).
Cette restriction n'a été que provisoire, et elle a été abolie le 15 av qui a suivi la conquête d' Erets Yisraël .

3. C'est le 15 av qu'a été abrogée par les tribus d'Israël l'interdiction d'épouser des membres de la tribu de Benjamin, édictée à la fin de la guerre civile consécutive à l'épisode de la « concubine de Guiv?a » ( Choftim 21, 1 : « L es hommes d'Israël jurèrent à Mitspa, disant : ?Nul de nous ne donnera sa fille pour femme à Benjamin.? »).

4. C'est le 15 av qu'ont été levés par Osée, roi d'Israël , les barrages que Jéroboam Ier avait établis pour em pêcher les tribus du Nord d'aller en pèlerinage à Jérusalem. Néanmoins, ainsi que l'explique Rachi ( ad II Rois 17, 2), les membres de ces tribus ont continué de s'abstenir de partir en pèlerinage, attitude qui eut pour conséquence le décret de leur exil du vivant de ce monarque. Jusqu'alors, ils attribuaient la responsabilité de leur inconduite à leur souverain. Maintenant, alors qu'ils avaient la possibilité de se rendre à Jérusalem, ils n'avaient plus à qui attribuer leur manquement. Ce qui correspond à l'annonce de du prophète Osée (Osée 5, 3) : « ? Car maintenant Efrayim s'est dépravé, Israël s'est rendu impur » ? maintenant, c'est votre propre inconduite qui sera la cause de votre exil.

5. C'est le 15 av , date appelée yom tavar magal (« Jour de la cassure de la hache »), que cessait l'abattage du bois utilisé sur les autels du Temple. A partir de cette date, le rayonnement du soleil devient en effet moins accablant, de sorte que le bois que l'on aurait alors coupé aurait été trop humide pour pouvoir brûler.

6. C'est le 15 av qu'ont pu être inhumés les cadavres de Bèthar. Lorsque cette ville, dernier bastion de la révolte de Bar Kokhba , tomba aux mains des Romains en l'an 133 de l'ère commune, ceux-ci se livrèrent à un effrayant massacre des survivants, et ils interdirent que leurs cadavres fussent inhumés.
Quinze années passèrent, pendant lesquelles les corps des victimes restèrent sans sépulture. Et lorsque permission fut enfin accordée de les enterrer, le 15 av 148, on s'aperçut qu'ils étaient restés intacts.
De là la quatrième berakha du Birkath ha-mazon , ha-tov weha-mètiv (« Celui qui est bon, et Celui qui fait le bien ») : « Celui qui est bon », pour ne pas avoir laissé les cadavres se putréfier, et « Celui qui fait le bien », pour avoir permis leur inhumation ( Berakhoth 48b).
Il y a bien longtemps, nous rapporte la dernière Michna du traité Ta?anith (4, 8), les jeunes filles de Jérusalem s'en allaient ce jour-là danser dans les vignobles, et c'est là qu'elles se trouvaient un fiancé.

Jacques KOHN Zal