Le marché des quatre espèces de Souccot ne dure certes que quelques jours par an. Cependant avant que Loulav, Etrog, Hadass et Arava ne soient agités ensemble à Souccot en Israël (et en Diaspora), ils doivent suivre un véritable parcours « du combattant ».

Hadass (myrte)
En Israël, c’est dans le mochav de Nov, sur le plateau du Golan, que sont cultivés 80 % des branches de myrte du pays et quasiment 100 % des Aravot exportées vers les États-Unis, le Canada, l’Afrique du Sud, l’Europe occidentale et la Russie.
Les premiers plants de Hadass sont arrivés à Nov sous l’impulsion du rav du mochav, le rav Igal Ariel. Issus des abords de la rivière Dvora, ils ont été cultivés avec toute la patience du monde par les agriculteurs du mochav. Il s’agit de branches de myrte différentes de celles qu’on trouve à Tsfat par exemple puisque leurs branches sont un peu moins denses ce qui permet de vérifier plus facilement leur cacherout.
Lorsque les familles juives commencent à peine à se souvenir que les fêtes approchent, à Nov, on est déjà en plein dans les préparatifs de Souccot.
Cultiver cette plante n’est pas une mince affaire : le myrte demande de gros investissements et ce n’est qu’une fois par an que les bénéfices sont récoltés.
Selon les cultivateurs de myrte, la période des fêtes est la plus exténuante de l’année et le travail s’étale sur les 24 heures de la journée.
Les exigences très sévères de la hala’ha quant à la cacherout du Hadass impliquent par exemple que le myrte ne soit pas fané. Or, dans la nature, le Hadass est constamment en floraison : le cueillir au moment de la floraison implique qu’il va faner très rapidement et devenir donc impropre à l’utilisation. Pour empêcher la floraison, les cultivateurs cessent durant quelques jours l’arrosage, ce qui permet à la plante de se transformer en arbuste et de durcir. Mais, cela ne marche pas toujours et assoiffer le myrte peut parfois être fatal. Il faut donc déterminer le moment précis où le myrte a cessé sa floraison d’une part, mais ne s’est pas asséché d’autre part. Lorsque ce moment arrive, commence alors un marathon de plusieurs journées de travail sans la moindre interruption. Il faut dans un premier lieu couper les branches avant de trier chacune d’entre elles – pour décider si elle est « uniquement » casher ou bien « méhoudar » – emballer et préparer à la livraison et tout cela avec la plus grande rapidité, mais en même temps avec la plus grande délicatesse.
Les ‘Hadassim de Nov arrivent en Europe avant Yom Kippour tandis qu’aux États-Unis, ils sont exportés juste après Roch Hachana, tout cela dans des containers réfrigérés.
Les cultivateurs vendent leurs myrtes aux grossistes sous trois niveaux de cacherout : casher, méhoudar et méhadrin, le prix de vente variant entre 8 et 30 shekels. Ceux qui le désirent peuvent acquérir directement des agriculteurs des Hadassim « hors-concours »dont le prix peut monter jusqu’à 120 shekels !
Arrivés sur le marché au détail, le prix des Hadassim varie entre 10 shekels pour une cacherout « normale », 18-20 shekels pour une cacherout « méhoudar » et 30 shekels pour une cacherout « méhadrin ».

Étrog (cédrat)
Le Étrog est considéré comme le « prince des fruits » et il mérite bien cette appellation : sa culture est extrêmement difficile et elle exige un professionnalisme et un dévouement sans bornes.
Le cédratier est par nature un arbre faible, qui nécessite un entretien quotidien pour le protéger des insectes et autres maladies.
En Israël, près de 100 hectares de terrains sont consacrés à la culture de l’Étrog, ce qui correspond à environ 1 million d’Étroguim par an. La demande en Israël est d’environ 700 000 cédrats et le reste est exporté vers les communautés juives de par le monde.
Mor Chwarstman, du mochav Hibat Tsion, est issu d’une famille de cultivateurs d’Étroguim venue de Russie en Israël il y a plus de 70 ans. Installés dans le Émèk Hefer, entre Nétanya et ‘Hadéra, ils ont fait venir leurs plants de Russie et aujourd’hui, ils se trouvent à la tête de 250 dounam de vergers de cédrats, qui constituent environ 300 000 Étroguim. Il explique pourquoi il a choisi de cultiver un fruit aussi coûteux : « Parce qu’une orange est un fruit et un Étrog est une mitsva et que cultiver un Étrog demande un respect et une attention de chaque instant. Il faut savoir qu’un cédratier a une durée de vie de sept ans à peu près. Or, lorsque vous enlevez les trois années d’Orla (au cours desquelles les fruits de l’arbre sont interdits) et une année de jachère, il ne reste que trois années productives. Par ailleurs, pour protéger les fruits des insectes et des maladies, nous devons les surveiller constamment et les attacher un par un alors qu’ils sont encore sur l’arbre. Le cédratier, enfin, a besoin d’énormément d’eau, beaucoup plus que les autres agrumes ». Mor Chwarstman affirme que les Étroguim casher sont vendus environ 8 shekels aux grossistes, les  » méhadrin  » pouvant aller jusqu’à 120 shekels. Il existe bien entendu des Étroguim d’exception dont le coût s’élève à plusieurs centaines de dollars ! Sur le marché du détail, le prix des Étroguim des trois catégories (casher, méhoudar et méhadrin) varie énormément : il commence aux environs de 20 shekels pour atteindre plusieurs milliers de shekels pour les plus méhoudarim.

Loulav (palmier)
Les deux principales espèces de Loulav sont le « Diri » ou « Déri », particulièrement apprécié par les Ashkénazes de par sa Tiyomet (son extrémité supérieure) totalement hermétique et le « Zahidi », qui est choisi en général par les Séfarades qui sont plus pointilleux sur le corps même du Loulav et ne renoncent pas à un Loulav si sa pointe n’est pas fermée.
« Le Déri a une Tiyomet parfaite, complètement fermée, mais ses feuilles sont par contre séparées les unes des autres tandis que le Zahidi, grand et épais, est enfermé dans une espèce d’enveloppe brune », nous explique Avner Rotem, du kibboutz Tirat tsvi, dans la vallée du Jourdain. Le kibboutz cultive à lui seul plusieurs centaines de milliers de Loulavim, qui suffisent amplement au marché local.
La culture du palmier n’est pas simple : il faut couper régulièrement ses branches pour lui permettre de grandir; il faut ensuite procéder au ‘ « kiyoutz  » qui consiste à retirer les épines qui se sont formées sous chaque branche de palmier.
Chaque palmier donne environ 12 grappes de dattes, mais les cultivateurs renoncent à environ la moitié pour que les six autres grandissent davantage. La prochaine étape consiste à « ‘ attacher  » chaque grappe au tronc afin qu’elle ne tombe pas, entraînée par son poids. Enfin, chaque grappe est enfermée dans un sachet spécial pour éviter qu’elle ne soit infestée de bêtes.
Quant au Loulav lui-même, il s’agit d’une des branches centrales de l’arbre.
« En marge du Déri et du Zahidi, nous cultivons également d’autres espèces de Loulav comme le Halawi et le Brahi », souligne Rotem.
Selon Avner, un Loulav casher est vendu aux grossistes environ 10 shekels et un méhadrin peut aller jusqu’à 60 shekels. Comme toujours, il existe des Loulavim beaucoup plus chers dont le prix grimpe jusqu’à 150 shekels. Au détail, les Loulavim sont vendus entre 20 et 90 shekels. Les Loulavim « ‘ spéciaux  » peuvent atteindre les 300 shekels.
Arava (saule)
La Arava est la seule des quatre espèces qui fane et s’assèche durant la fête : il est donc nécessaire de la changer au moins une fois au courant de Souccot. Les Aravot sont en général vendues pour quelques shekels par des vendeurs au détail. Mais certains tentent d’économiser sur ces quelques shekels.
Tu ne voleras point… d’Arava ! Quoi de plus simple en effet que d’aller cueillir dans la nature quelques branches de saule (Arava) pour accomplir la mitsva du Loulav ? Mais selon l’Autorité de la Nature et des Jardins (ANJ), cette cueillette peut avoir des conséquences dramatiques pour les arbres. Selon les inspecteurs de l’ANJ, chaque année, de très nombreux arbres subissent de graves dommages à l’approche de Souccot, de bons Juifs ayant décidé de couper leurs branches pour en constituer le toit de leur Soucca ou, dans le cas des saules, pour les utiliser pour leur Loulav.
L’ANJ rappelle que chaque municipalité met à la disposition de ses habitants des branches coupées selon les règles et pouvant servir de S’ha’h pour la Soucca.
« Les branches sont arrachées avec sauvagerie et non seulement l’arbre en question souffre, mais également toute la flore alentour. Certains arbres mettent des années à faire repousser de nouvelles branches, ce qui menace certaines espèces de disparition ».
Il y a déjà plusieurs années, les grands rabbins d’Israël, rav Chlomo Amar et rav Yona Metzger, avaient publié une interdiction formelle d’utiliser des branches volées pour recouvrir la Soucca ou des branches d’Arava volées pour la mitsva du Loulav : « Il est interdit de prononcer la bénédiction sur un Loulav volé et il convient donc de vérifier qu’on ne fait pas l’acquisition de marchandise volée », ont rappelé les rabbanim.
Selon Gal Ariéli, du département de la juridiction de l’ANJ, le palmier, le saule et le myrte sont des espèces protégées : « Avec le développement et l’agrandissement des zones habitées, ces espèces deviennent de plus en plus rares et il convient donc de les respecter ». Selon lui, l’amende réservée aux contrevenants varie entre plusieurs centaines et plusieurs milliers de shekels.En partenariat avec Hamodia.fr