Parmi les nombreuses lois énumérées dans la parachath Michpatim , il en est une qui paraît singulière, ou du moins anormalement rédigée : « Une sorcière, tu ne la laisseras pas vivre » ( Chemoth 22, 17). Pourquoi « une sorcière », et non « un sorcier » ?

La Tora tolérerait-elle la sorcellerie dès lors qu’elle serait pratiquée par un homme, et non par une femme ? Une première réponse à cette question est fournie par Rachi , citant Sanhédrin 67a : « Le texte s’applique aux hommes autant qu’aux femmes, mais il parle de ce qui est le plus courant, car c’est la sorcellerie féminine qui est la plus répandue. »

Relevons également que la Tora réprouve ailleurs de la même façon la sorcellerie qu’elle soit pratiquée par un homme ou par une femme : «  Et un homme ou une femme qui pratiqueront une évocation ou un sortilège devront être mis à mort » ( Wayiqra  20, 27). Une autre interprétation de la « féminisation  » de cette condamnation de la sorcellerie est proposée par un grammairien médiéval, rabbi Y onah ibn Gianah (990-1050)  : Le mot mekhachéfa , habituellement traduit par « sorcière », ne serait pas le féminin de mekhachef (« sorcier »), mais un terme générique désignant la sorcellerie en général, de même que le mot daga ne serait pas le féminin de dag (« poisson »), mais désignerait la « poissonnaille », c’est-à-dire les poissons en général, comme dansBerèchith 1, 26 et 28, Chemoth  7, 18 et 21, Bamidbar  11, 5 et Devarim4, 18.

On peut formuler la même remarque à propos de la cigogne, en hébreu hassida  : Elle n’est pas la forme féminine du mot ?hassid (« homme pieux »), même si Rachi ( ad Wayiqra  11, 19) attribue à cet oiseau la vertu de la bonté ( hassidouth ).

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Haftarath Michpatim  : Un affranchissement pour rien

La parachath Michpatim traite en premier lieu de l’institution de « l’esclavage » tel que la conçoit la Tora , c’est-à-dire un système qui s’apparente plus à un contrat de travail à durée déterminé et comportant des obligations strictement définies qu’à une véritable servitude. Lahaftara qui est associée à cette paracha (Jérémie 34, 8 à 22) porte également sur « l’esclavage », mais elle relate un événement dramatique qui a eu lieu pendant l’une des trêves où le siège de Jérusalem a été momentanément levé par les Babyloniens. Pour tenter d’écarter la menace que l’ennemi avait fait peser sur les Juifs, ceux-ci avaient affranchi « chacun son serviteur, et chacun sa servante, hébreu ou hébreue, pour que personne ne réduisît plus en esclavage son frère, un Juif » (Jérémie 34, 9). Mais une fois le danger passé, ils firent machine arrière, et assujettirent à nouveau les hommes et les femmes qu’ils avaient libérés, et ils les rétablirent dans leur précédent état de serfs. C’est alors que Hachem s’adressa au prophète : Puisque les Judéens ont ainsi désobéi à la Tora , ils seront abandonnés aux mains de leurs ennemis, et Jérusalem sera livrée aux flammes, tandis que le pays sera dépeuplé de ses habitants. La haftara va cependant s’achever sur une note plus rassurante. Remontant du chapitre 34 au chapitre 33, ce qui est exceptionnel, elle nous réconforte par ses deux derniers versets : «  Ainsi a parlé Hachem  : Si Mon alliance avec le jour et la nuit ne subsistait pas, si Je cessais de fixer les lois des cieux et de la terre, alors aussi Je rejetterais la descendance de Jacob et de David, Mon serviteur »

Jacques KOHN zal’