Cha‘aré Yom Kippour

Les kapparoth

S’IL SE TROUVE UN ANGE QUI INTERCEDE POUR [LUI], UN SEUL ENTRE MILLE, EN DISANT LA DROITURE DE L’HOMME, IL (HACHEM) LUI FERA GRACE ET DIRA: “RACHETE-LE POUR QU’IL NE DESCENDE PAS EN ENFER.” (Job 33, 23 – Ce passage se récite avant les kapparoth)

Le ‘Hafets ‘Haïm disait: “Même les plus grands pécheurs d’Israël sont pleins de mitsvoth comme les grenades sont emplies de graines. Il ne se trouve donc personne qui n’ait de nombreux avocats puisque la michna nous enseigne: ‘Quiconque accomplit une mitsva s’acquiert un avocat’ (Avoth 4, 11). S’il en est ainsi, tout le monde devrait être acquitté lors du Jugement!”

Le problème est que la présence d’un défenseur ne suffit pas encore faut-il qu’il soit capable, qu’il ait de la valeur et du talent.

Un homme attendait de passer en jugement pour une faute très grave. S’il était déclaré coupable, il risquait la peine capitale et la confiscation de toute sa fortune. Cependant, certains amis le tranquillisèrent en lui disant que l’acte d’accusation n’était pas si alarmant et qu’un bon avocat réussirait certainement à réfuter les arguments du procureur. A ces mots, notre homme fut soulagé et se dit: “S’il en est ainsi, pourquoi prendre un avocat particulièrement brillant et dépenser beaucoup d’argent? Je me suffirai d’un débutant qui se contentera d’honoraires plus modestes!”

A l’ouverture du procès, le procureur lut le long réquisitoire. La parole fut à la défense mais l’accusé avait choisi un avocat qui bégayait! Il est évident qu’il fut condamné à une lourde peine. En voulant économiser quelques sous, il perdit tout ce qu’il possédait.

Hélas! Nous ressemblons, à cet accusé. Certes, toute mitsva que nous accomplissons crée un ange défenseur. Cependant le verset précise: “s’il se trouve [non seulement] un ange [mais] qui [de plus] intercède pour lui”. En effet, une mitsva faite en passant, sans y penser, sans faire attention aux détails halakhiques de son application crée un ange difforme, infirme, bègue ou muet. Si un homme se faisait défendre même par une armée d’avocats de ce genre, l’un boiteux, l’autre manchot, le troisième borgne, le quatrième bègue… il serait la risée du tribunal et cela nuirait certainement à sa cause.

L’homme doit donc se soucier de faire au moins une mitsva à la perfection afin d’avoir un avocat brillant capable de le défendre, de le racheter de la mort et de l’enfer!

(Michlé hé‘Hafets ‘Haïm, 51)

QUELLE DIFFERENCE EXISTE-T-IL ENTRE UNE CONFESSION ET UNE ACCUSATION?

Au cours d’une dracha précédant Kol Nidré, le maguid de Doubno expliqua les paroles du midrach (parachath Ki Tissa) sur le verset: “…s’il n’y avait pas eu Moché, Son aimé, qui s’est tenu sur la brèche – ‘amad bapérèts: amad bimeqom haporèts. Moïse s’est tenu à la place de celui qui fait la brèche il a repoussé le Satan et a pris sa place. Dès que Moché a dit: “De grâce, ce peuple-là a commis une grande faute”, tous les anges dénonciateurs s’éclipsèrent en disant: “Pourquoi nous poser en accusateurs? Il vaut bien mieux que Moché lui-même s’en charge!”

De même, quiconque confesse ses péchés et reconnaît ses fautes ferme la bouche aux anges accusateurs. “Il n’est pas nécessaire que nous accusions le pécheur”, disent-ils, “puisqu’il avoue lui-même et énonce dans le détail toutes les infractions qu’il a commises!”

Dans ces conditions, quel est donc l’intérêt du vidouï? Pourquoi le dire plutôt que laisser les anges accuser? Qu’est-ce qui différencie l’aveu d’une faute et sa dénonciation? Elle réside… dans le ton, dans la mélodie, dit le maguid, et il s’explique par un machal:

Un marchand se rendit à la grande foire. Avant de prendre le chemin du retour, il acheta un beau costume pour son fils. Lorsqu’il reçut son cadeau, l’enfant ne se tint plus de joie et s’empressa de l’endosser pour se faire admirer, dehors, par ses camarades. Ceux qui avaient bon caractère le complimentèrent mais d’autres, jaloux, l’enviaient secrètement. Un quart d’heure plus tard, alors qu’ils étaient en train de jouer, le garçon trébucha sur une pierre et tomba dans la boue. Lorsqu’il se releva, il fut effaré de voir son beau costume neuf maculé de taches!

“Je vais courir chez ton père lui raconter que tu as sali ton nouvel habit!” s’exclama l’un de ses camarades envieux, les yeux brillants de joie.

L’enfant prit peur. Si ce camarade allait le dénoncer à son père, il se mettrait certainement en colère contre lui. Que fit-il? Il fila chez lui comme une flèche pour devancer son camarade et s’écria, en larmes: “Papa! Regarde ce qui m’est arrivé! Regarde dans quel état est mon nouveau costume!”

Et le père, pris de pitié, le consola en disant: “Ne pleure pas! On peut laver ton habit, on peut le nettoyer et, au pire, je t’en achèterai un autre…”

Quelle est la différence entre la dénonciation du camarade et la confession de l’enfant? Le ton, la manière de le dire…

Tel est le sens des paroles de David hamélekh: “Eloignez-vous de moi, vous tous, anges du mal car Hachem a écouté le son de mes pleurs”. Si notre confession est accompagnée de larmes et de supplications, les anges accusateurs seront réduits au silence.

La Tora exprime cette même idée dans le verset: “Car la chose est très proche de toi, elle est présente dans ta bouche et dans ton cœur pour que tu puisses l’accomplir”. Quand le repentir est-il efficace? Lorsque le cœur s’associe à la bouche lors de la récitation du vidouï!

(Ohel Ya‘aqov, Emor)

LES DIX VIDOUIM DE YOM KIPPOUR

Pourquoi nos Sages ont-ils institué de répéter tant de fois le vidouï? Rabbénou Yossef Guikatilia comparait le péché à la corde qui permet de tirer l’eau du puits. Cette corde est très solide mais à force d’être utilisée, elle s’use peu à peu jusqu’à se déchirer.

La faute la plus grave est comparable à cette corde. Si le pécheur en demande le pardon maintes fois, sans se lasser, elle finira par s’effacer et disparaître comme il est dit (Isaïe 44, 22): “J’ai dissipé tes fautes comme un brouillard et tes péchés comme un nuage”.

(Séfer hamechalim, 53)

A ce propos, le maguid de Ratsky racontait:

Un des membres de ma communauté contracta une grave maladie qui mit sa vie en danger. Le médecin appelé à son chevet confirma que le moment critique approchait mais si le malade commençait à transpirer, dit-il, sa fièvre tomberait et il serait sauvé. Dieu merci, il se mit à transpirer et, bien que la fièvre fût toujours élevée, le médecin manifesta son soulagement. “Le malade est effectivement couvert de sueur mais comment se fait-il que la fièvre n’ait pas disparu?” ai-je demandé, inquiet.

“Voyez-vous, Rabbi”, me répondit le médecin, “lorsqu’une voiture roule, la roue tourne sans arrêt, mais le voyageur n’est toujours pas parvenu à destination. Nous savons toutefois qu’à chaque tour de roue, la voiture se rapproche de son but… Il en est de même pour notre malade: chaque goutte de sueur nous rapproche de la guérison”.

Ainsi, disait le maguid, à chaque vidouï, le cœur s’attendrit davantage et les péchés fondent peu à peu…

(Seriguei nefichei, derouch 7)

NOUS SOMMES OPINIATRES ET TOI, TU ES LONGANIME

Que signifie cet argument, cette excuse? Le maguid de Doubno posa cette question à propos de ce que dit Moché Rabbénou (Chemoth 34, 9): “Si j’ai trouvé grâce à Tes yeux, de grâce, qu’Hachem soit parmi nous car c’est un peuple opiniâtre”. Or, Hachem n’avait-Il pas dit auparavant (Chemoth 33, 3): “Car Je ne monterai pas avec toi car tu es un peuple opiniâtre”? Dans la bouche de Moché, ce même défaut devint un argument, une raison pour demander la présence de la Chekhina parmi les Enfants d’Israël! Comment est-ce possible? Le maguid l’expliqua par un machal:

Un colporteur acheta un important lot de chutes de tissu épais et rude, de tous coloris et de tous genres, dans l’intention de les vendre comme pièces de raccommodage. Un petit rapiècement peut parfois sauver un vêtement et il comptait tirer un bon bénéfice de sa marchandise. Son ballot sur le dos, il se rendit à la capitale. Là-bas, se dit-il, les habitants sont riches et ils donneront un bon prix pour ma marchandise.

Lorsque les habitants de la capitale virent de quels articles il s’agissait, ils lui dirent: “Excusez-nous, cher ami, mais ce n’est pas ici que vous trouverez des clients. En ville, les gens portent des habits très élégants, et si l’un d’eux se déchire, on le jette, voilà tout! Si vous voulez vraiment vendre votre marchandise, rendez-vous plutôt dans les villages, à la campagne. Là-bas, les gens portent des habits simples et bon marché et n’hésitent pas, si besoin est, à les raccommoder avec des pièces de tissu!”

Hachem a révélé à Moché Rabbénou qu’Il était “miséricordieux et clément, longanime, plein de bonté et de vérité, qu’Il supporte l’offense, le péché, la transgression”. Ces attributs ont pour objet de pallier à nos erreurs, à nos manques et de “rapiécer les déchirures”. Moché Rabbénou dit alors: “Maître du monde! Dans le ciel, il n’y a pas de clients pour cette sorte de marchandise. Tout le monde porte des habits élégants et chers qui ne se déchirent jamais. ‘Si j’ai trouvé grâce à Tes yeux, qu’Hachem soit parmi nous’ qu’Il use de Ses attributs envers nous, ‘car c’est un peuple opiniâtre’ chez nous, les habits se déchirent sans cesse. C’est pourquoi: ‘Tu pardonneras notre faute et nos péchés et Tu nous conserveras en héritage.’”

Ainsi, nous disons: “nous sommes opiniâtres”, c’est pourquoi il sied que Tu uses à notre égard de Ton attribut: “longanime”!

(Ohel Ya‘aqov, Ki tissa)

Compilées et rédigées par Chalom Méir Wallach

Traduction de l’hébreu: Esther Meyer

Editions Daath