Composé au XVIè siècle par le rav Chlomo haLévy Alkabetz, le célèbre Piout « Lekha Dodi » est lu dans toutes les communautés juives du monde lors de la « kabbalat Chabbat », l’accueil du jour saint.

Il convient de faire toutefois remarquer que seuls les deux premiers couplets de ce poème sont consacrés à l’importance du Chabbat : « ‘Garde-le et souviens-t’en’ ont été prononcés dans une seule parole (…) » et « Il est source de bénédictions. (…) La fin de l’oeuvre est déjà dans la pensée (…) ». Tandis que les sept autres couplets développent les thèmes de la reconstruction de Jérusalem, de la venue du Machia’h et de la fin de l’exil, c’est-à-dire précisément celui du dévoilement de la Royauté divine. Cette anomalie demande une explication…

Le Rambam enseigne : « Tout homme est enjoint de se laver le visage, les mains et les pieds à l’eau chaude la veille de Chabbat en vertu de la gloire (Kavod) du Chabbat. Il doit aussi s’envelopper d’un Talit et s’asseoir pour se préparer (Mi’hel) à recevoir le Chabbat avec déférence, comme l’on reçoit un roi. La veille du Chabbat, les anciens réunissaient leurs élèves, s’enveloppaient d’un Talit et disaient : -‘Venez ! Sortons recevoir le roi Chabbat’ » (Lois du Chabbat, chapitre 30, 2).

Le terme utilisé ici – « Mi’hel » – vient du verbe « Yiva’hel [se préparer] » et désigne l’idée de l’attente d’un dévoilement, ou plus exactement d’un engagement en vue d’un dévoilement, comme dans le verset : « Vayia’hel Od Chivat Yamim – [(Noa’h) attendit encore sept jours] », (Béréchit, 8, 12). Et ce, car l’enseignement central de ce poème, c’est que la réalité du Chabbat est fonction de notre disposition à le recevoir ! Qu’il ne peut y avoir de dévoilement sans une volonté (ratson) qui le suscite. La réalité du Chabbat comme expression de la Royauté divine dépend du respect (kavod) que nous sommes prêts à lui accorder, comme l’affirme rabbi Chimon bar Yo’haï quand il dit qu’ « Il suffirait qu’Israël observe deux Chabbatot conformément à la loi pour qu’aussitôt nous soyons délivrés » (Traité talmudique Chabbat, page 118/b). Ainsi, quand nous chantons à la fin de ce Piout « Tokh Emouné Am Ségoula (…) Chabbat Malkéta [littéralement : « la reine Chabbat] », il faut bien comprendre que n’est pas désignée ici la femme du roi, mais bien la forme féminine de la royauté (malkhout) : cette dimension qui n’existe (Lèt la miGuerma kloum) qu’en vertu de notre capacité à nous engager dans la reconnaissance inconditionnelle du Roi des rois…

Y. R.
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