Riche en fêtes et en événements, tichri est appelé : le « mois des puissants » (I Melakhim 8, 2). Il débute par Roch Hachana, formé des deux premiers « jours de pénitence », lesquels s’achèvent avec Yom Kippour, où Hachem scelle Son jugement.
Nous célébrons ensuite Soukoth, caractérisée par deux mitswoth essentielles : le loulav (Wayiqra 23, 40) et la souka (ibid. 23, 42).
Cette fête étant si proche des « Jours redoutables » du jugement, il est légitime de se demander si elle en forme ou non la continuité : En quoi le fait de s’exiler huit jours durant dans une « cabane » exposée à tous les vents parachève-t-il la démarche de techouva accomplie juste auparavant ?

En réalité, au fil de notre l’histoire, nous observons que l’exil, malgré – ou plutôt avec – ses souffrances et ses tourments, constitue un passage nécessaire et incontournable destiné à ce que nous nous souvenions de Hachem. Il nous permet d’abandonner notre sentiment d’orgueil, qui ne laisse place qu’à notre « Moi », pour atteindre l’humilité, avec laquelle, seule, nous devenons aptes à assumer le Joug divin.
La fête de Soukothmarque le moment de notre richesse matérielle, puisqu’elle succède à l’engrangement des récoltes pour la nouvelle année. Nous nous y sentons « riches » matériellement, mais aussi spirituellement, puisque nous venons d’achever les jours de notre repentance. A Soukoth, nous nous sentons ainsi au faîte de notre élévation spirituelle.
Dans cette situation, le risque de céder à l’orgueil est immense, et pour l’écarter, il nous incombe de nous « exiler » dans une souka qui nous aide à continuer de ressentir Sa Présence et à ne pas gâcher notre élévation accomplie de Roch ha-Chana jusqu’à Yom Kippour.
A Soukoth, nous atteignons une nouvelle dimension de techouva, qui va parfaire celle atteinte il y a à peine quatre jours. Voilà pourquoi, juste après Yom Kippour, nous nous empressons de construire notre souka, dans le dessein de nous maintenir à ce niveau si difficilement acquis, puis de le dépasser.
Mais « la souka sera pour l’ombre, le jour, contre la chaleur… » nous est-il dit (Yecha’ya 4, 6). Qu’a-t-elle alors de si spirituel pour nous qui y mangeons et y dormons ?!
Même si les gestes que nous y réalisons sont en apparence banaux, la souka nous protège en ce qu’elle nous permet, avec les mitswoth que nous accomplissons au fil de la fête, de prendre conscience d’un riche enseignement et de le garder pour tous les mois à venir : même des actes physiques comme manger et boire peuvent nous élever spirituellement. Ainsi, alors que Roch ha-Chana et Yom Kippour, où nous nous affairons principalement à la prière et à Son service,marquent la techouva du paraître, Soukoth relève de la techouva de l’être, par laquelle nous changeons notre intériorité. Manger, boire et dormir revêtent la dimension de mitswoth dès lors que ces actes sont voués à Hachem, et qu’ils sont destinés à l’acquisition des forces nécessaires pour Le servir. Le moindre de nos gestes, s’il est dirigé vers Lui, possède cette virtualité, et cela est riche d’enseignement pour l’accomplissement de Ses commandements, mais aussi de tout acte banal au long de l’année.
Sous cet aspect, Soukoth marque bel et bien la finalisation des jours redoutables, dans la joie. Comme nous le déclarons dans la prière de moussaf : « Tu nous as choisis parmi tous les peuples ; Tu nous as aimés […] Tu nous as rapprochés, ô notre Roi, pour Ton service… »

‘Hag saméa‘h !

Rav Dov Roth-Lumbroso