« Pharaon ordonna à tout son peuple en disant : Tout fils qui naîtra vous le jetterez dans le fleuve, et toute fille vous la laisserez en vie » (Chemoth 1, 22).
Ce que voulait Pharaon, c’était se débarrasser des nouveau-nés mâles en les faisant jeter dans le fleuve, tandis que le sort des filles ne semblait pas l’intéresser. Pourquoi alors a-t-il ajouté : « et toute fille vous la laisserez en vie », ce qui allait de soi ?

Pharaon, répond à cette question le Ha‘èmeq davar, tenait absolument à ce que les filles soient maintenues en vie. Désireux d’améliorer le patrimoine génétique de son peuple, il comptait sur la diminution drastique du nombre d’enfants mâles chez les enfants d’Israël pour que les filles épousent des Egyptiens.

Or, il avait pu constater que les femmes hébreues étaient vigoureuses, ainsi qu’en témoigne le verset : « Les sages-femmes dirent à Pharaon : Elles ne sont pas comme les femmes égyptiennes, les hébreues, car elles sont vigoureuses… » (Chemoth 1, 19. De cette façon, pensait-il, son propre peuple s’en trouverait fortifié et renforcé.

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Haftarath parachath Chemoth – Les ivrognes d’Ephraïm

Dans le premier verset de la haftara (Isaïe 27, 6), le prophète annonce que Jacob prendra racine, et que c’est en tant qu’Israël qu’il fleurira et donnera des fruits. Ce changement de dénomination témoigne de l’irrésistible élévation du peuple juif, d’abord opprimé en tant que Jacob, puis promu à la dignité d’Israël.
A propos du verset : « Et les enfants d’Israël fructifièrent, grouillèrent, se multiplièrent, devinrent puissants en abondante abondance, le pays en fut rempli » (Chemoth 1, 7), Sforno souligne la parenté du motוישרצו (« grouillèrent ») avec שרצים (« vermines »), comme si la Tora avait voulu comparer les enfants d’Israël à des pullulements d’insectes et de créatures rampantes.

Sforno explique ce rapprochement par le déclin du niveau de spiritualité de nos ancêtres en Egypte, dont ils avaient adopté la culture et les dévergondages.
Dans notre haftara, le prophète reprend le même thème en l’appliquant à ses contemporains, et spécialement aux « ivrognes d’Ephraïm » dont il prédit le prochain effondrement (Isaïe 28, 1 et suivants).

Mais il ajoute aussitôt que « ce jour-là Hachem des armées sera pour couronne de beauté et pour diadème d’ornement au reste de Son peuple » (28, 5), annonçant ainsi qu’après la destruction d’Ephraïm, symbole du Royaume du Nord, surviendra une ère de bonheur pour « le reste de Son peuple », c’est-à-dire le Royaume de Juda (d’après Radaq).

Jacques KOHN.zal’