Estimant n’avoir pas été consultés, les dayanim hollandais dénoncent l’accord sur l’abattage rituel. Et ne facilitent pas la tâche de leurs homologues français….

L’essentiel est assuré : le Sénat hollandais a largement rejeté la semaine dernière une proposition de loi portant sur l’interdiction de l’abattage rituel. Avec 51 voix contre 21, les parlementaires bataves referment la page ouverte il y a un an par le Parti des animaux qui menaçait de mettre en péril la che’hita en rendant l’étourdissement préalable obligatoire.
Mais l’épisode a entraîné une crise au sein de la communauté juive locale. Quelques jours avant le vote des sénateurs, les représentants des communautés juives et musulmanes avaient en effet accepté de signer avec le Ministère de l’Agriculture un accord portant sur un certain nombre de mesures destinées à rassurer les défenseurs de la cause animale. Outre une meilleure formation des sacrificateurs, la taille des couteaux utilisés, la nouvelle procédure prévoit un étourdissement post égorgement si dans un délai de quarante secondes, l’animal continue à manifester des signes de vie. Un deal signé, côté juif, par le président de la communauté juive hollandaise (NIK), Ron Eisenmann, celui de la communauté d’Amsterdam et le grand rabbin Binyamin Jacobs, grand rabbin des Provinces-Unies. Vice-président du Conseil rabbinique européen (CER), ce dernier était la « caution » rabbinique des négociateurs.
Le Beth-Din d’Amsterdam a alors immédiatement réagi en publiant un communiqué dénonçant cet accord « qui ne correspond ni à nos souhaits, ni à nos recommandations ». Ce document signé par le av Beth-Din, rav Aryé Ralbag, ainsi que les dayanim rav Rapahel Evers et rav Élézer Wolff a fait l’effet d’un coup de tonnerre au sein de la communauté juive. Sur le fond, ils reprochent aux nouvelles procédures de reposer sur des critères vétérinaires flous qui à terme menaceront à nouveau l’abattage rituel. « Mais c’est surtout la méthode employée qui est inacceptable. Le judaïsme hollandais est en effet régi par des règles très précises qui prévoient que le Beth-Din soit systématiquement consulté pour les questions hala’hiques. Or, les responsables du NIK ne nous ont pas consultés dans cette affaire », regrette le rav Wolff.
Bien décidé à faire respecter son autorité hala’hique, le Beth-Din a donc prévenu qu’il n’accorderait pas de certificat de cacherout pour un animal étourdi selon la procédure prévue par l’accord passé avec les autorités néerlandaises.
Mais l’affaire pourrait avoir des répercussions au-delà de la communauté juive des Pays-Bas. La lettre signée par le rav Ralbag et ses dayanim reconnaît en effet noir sur blanc que l’étourdissement quarante secondes après l’égorgement ne remet pas en cause la validité de la che’hita. Or, en France, les responsables de la communauté juive estiment ce délai trop court pour « produire » de la viande casher.
Selon le grand rabbin Bruno Fiszon, qui gère le dossier au Consistoire central, 45 secondes au minimum sont nécessaires avant l’étourdissement. Un argument qui a notamment permis d’obtenir que les pouvoirs publics français se montrent « larges » et fixent un délai de 90 secondes avant étourdissement dans le décret de décembre 2011 réglementant l’abattage rituel. Le risque c’est que sous la pression des défenseurs des animaux, la France finisse par se ranger à la solution hollandaise et divise ce délai par deux…   Par Serge Golan,en partenariat avec Hamodia.fr